Start-up et levées de fonds : la complexité et les enjeux du calcul de la valorisation

Start-up et levées de fonds : la complexité et les enjeux du calcul de la valorisation

Une fois l’idée trouvée, et leur Start-up créée, les fondateurs se retrouvent, très généralement, confrontés à la problématique du financement de leur projet et à la nécessité d’effectuer une ou plusieurs levées de fonds successives.

Alors qu’une entreprise naissante classique qui repose sur un modèle économique déjà connu, est en mesure de se financer par de la dette, ce mode de financement reste globalement fermé aux Start-up. En effet, celles-ci proposent par définition un modèle économique disruptif à partir duquel le prêteur ne dispose d’aucune visibilité ni d’indicateur sur sa viabilité.

Dès lors, les Start-up n’ont pas d’autre choix que de se tourner vers un financement en fonds propres et d’effectuer des levées des fonds auprès d’investisseurs qui accepteront de prendre un risque sur l’actif économique moyennant une rentabilité exigée supérieure.

Les levées de fonds se réaliseront dans la majorité des cas au travers d’une participation de l’investisseur au capital de la société innovante lors d’une augmentation de capital qui lui sera réservée. La question qui va alors immédiatement se poser est celle de la valorisation de la Start-up.

En effet, les fondateurs qui ont souscrit leurs actions à une valeur nominale donnée, vont estimer que l’investisseur devra payer une sorte de droit d’entrée sous la forme d’une prime d’émission, pour pouvoir acquérir une quote-part du capital.

Toute la question est donc de déterminer la valorisation de la Start-up pour calculer le montant de cette prime d’émission. Or le calcul de cette valorisation est bien souvent complexe. Les méthodes d’évaluation classiques traditionnellement applicables pour les entreprises matures ne peuvent pas être utilisées pour des Start-up en raison de l’absence d’un historique comptable et financier, et d’une visibilité spéculative engendrée par un modèle économique qui n’a jamais fait ses preuves.

La pratique a donc développé plusieurs méthodes propres à l’évaluation de ce type de société qui pourront servir de référence à l’entrepreneur et à l’investisseur pour déterminer une approche de valorisation.

Parmi ces méthodes, on trouve notamment la méthode du « Scoring » et la méthode « Venture capital ».

Levées de fonds et méthode du “Scoring”

Dans la méthode du « Scoring », il s’agit de déterminer une valorisation maximale en fonction de la présence ou non de certains critères déterminés. Par exemple, l’existence d’un prototype permettant de réduire le risque technologique, l’expérience reconnue de l’équipe dirigeante, l’existence de partenariats stratégiques permettant d’accroitre la possibilité de synergies et de réduire le risque d’accès au marché, l’absence de barrières à l’entrée, les opportunités de sortie …

Levées de fonds et méthode du “Venture capital”

Dans la méthode « Venture capital », il s’agit d’appliquer une combinaison de la méthode des multiples et de la méthode de l’actualisation des flux de trésorerie disponibles.

La première étape consiste à valoriser les capitaux propres de l’entreprise à horizon de 4 à 7 ans, lorsqu’elle aura atteint un niveau de maturité lui permettant d’être introduite en bourse ou d’être rachetée par un industriel, ce qui marquera dans le même temps la sortie de l’investisseur. Cette valeur future est calculée en appliquant le PER aujourd’hui constaté sur des sociétés similaires à ce stade de développement, au résultat net prévu dans le business plan à cet horizon.

La deuxième étape consiste à actualiser cette valeur en appliquant un coefficient d’actualisation dégressif en fonction du stade de développement de l’entreprise. Généralement, les coefficients appliqués pour un premier tour de financement sont compris entre 60 et 50% [1]. Plus le niveau de risque de l’investissement est élevé, plus le coefficient appliqué sera important.

L’application de cette méthode n’est pas sans difficultés. En effet, elle repose sur l’existence d’une société comparable pertinente ce qui n’est pas toujours le cas, d’un business plan réalisable et de l’évaluation du risque pour la détermination du coefficient d’actualisation à utiliser.

Levées de fonds et stratégie d’investissement 

Nonobstant ces méthodes, chaque valorisation sera aussi déterminée en fonction des mécanismes d’ingénierie juridico-financière choisis pour la réalisation de l’investissement (mise en place d’instruments relutifs au bénéfice des fondateurs, présence de clauses de ratchet ou actions de préférence à droits privilégiés au profit de l’investisseur…).

La valorisation d’une Start-up est donc un exercice particulièrement complexe dont l’enjeu est de se rapprocher le plus possible d’une juste valorisation qui saura faire converger les intérêts des fondateurs et des investisseurs, lors des levées de fonds successives.

Malgré tout, bien souvent, les fondateurs qui affichent une foi sans faille dans leur projet, ont tendance à proposer une survalorisation lors du premier tour. Or il s’agit d’un écueil pouvant entraîner de graves conséquences pour la suite du projet, et notamment pour les levées de fonds complémentaires.

En effet, la plupart du temps, les investisseurs exigent la présence de clauses de ratchet destinées à compenser une baisse éventuelle de la valorisation de leurs actions aux tours suivants, en leur permettant d’en souscrire de nouvelles pour un prix symbolique.

Selon le type de ratchet (full ou weight average), leur mise en œuvre entraînera de facto un effet dilutif plus ou moins important sur la participation des fondateurs, ce qui risque d’entraîner des problèmes de motivation et par voie de conséquence la mise en danger de la viabilité du projet.

Par ailleurs, une baisse de la valorisation est un signal particulièrement négatif pour les prochains investisseurs qui seront plus réticents à participer à des levées de fonds complémentaires.

Il est donc absolument nécessaire d’éviter d’imposer une survalorisation et de trouver un compromis.

Une solution intermédiaire consiste à proposer une valorisation plus modeste mais de mettre en place des mécanismes de relution au profit des fondateurs (BSA, BSPCE …) qui pourront être éventuellement exercés dans l’hypothèse de l’accomplissement de « Milestones » (par exemple le lancement de la commercialisation du produit) ou du franchissement de certains seuils comptables ou de rentabilité (CA, EBE …).

Cette solution a aussi le mérite de fournir une motivation supplémentaire aux fondateurs, ce qui permet de faire converger leurs intérêts avec ceux des investisseurs.